- société
Samantha Ben-Rehouma
Lancé depuis 1995 par le Centre de Recherches, d’Etudes, de Documentation et d’Information sur la Femme (Credif), le prix Zoubeïda Bchir (prix portant le nom de la première poétesse tunisienne Zoubeida Bchir, décédée le 21 août 2011, à l’âge de 73 ans) est devenu le baromètre incontournable des écrits des femmes tunisiennes.
C’est donc au cours d’une cérémonie au Crédif que, Samira Marai, ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfance, a pu constater que la moisson 2015 a été des plus florissantes puisque c’est à elle qu’est revenu le privilège de remettre ces prix qui, comme elle a précisé « permettent de mieux faire connaître les compétences féminines dans les domaines scientifiques et littéraires ».
Le prix de la création littéraire en langue arabe a été décerné à la poétesse Salha Jelassi. Cette dernière a beaucoup ému l’assistance en lisant quelques pages de son ouvrage dédié à la Tunisie et à l’enfance.
Le prix de la création littéraire en langue française a été remporté par Azza Filali pour son roman «les intranquilles» (sans majuscules, svp !), un ouvrage de 239 pages qui se lit d’une seule traite tant il est captivant et avec une fresque de portraits de la société tunisienne très intéressante.
Sophie Bessis, absente car retenue en Algérie pour son travail, s’est vue attribuer le prix de la Création Féminine en Sciences Sociales (Histoire, Géographie, Philosophie, Psychologie, Sociologie) pour «La double impasse : l’universel à l’épreuve des fondamentalismes religieux et marchand». Ouvrage dans lequel elle dénonce les méfaits de la mondialisation, brossant le portrait d’un conservatisme religieux, complice en quelque sorte d’un capitalisme libéral, et ce, au détriment de la liberté et des fondements démocratiques.
Zakia Sayah Dahmani a obtenu le prix de la recherche scientifique en langue arabe et le prix de la recherche scientifique en sciences exactes est revenu à Awatef Issaoui pour son article First evidence of cell deformation occurrence during a Dinophysis bloom along the shores of the Gulf of Tunis (SW Mediterranean Sea) publié dans Water Environment Research (WER).
«Le prix Zoubeïda Bchir est l’occasion pour encourager les femmes tunisiennes à la créativité avec des sujets portant sur les causes féminines et vu sous plusieurs approches» a déclaré Dalenda Larguech, directrice générale du Credif, tout en soulignant l’importance de l’enracinement de la culture de la parité dans la société tunisienne ainsi que la valorisation du rôle de l’élite féminine dans le développement de la société.
Une fois terminée la cérémonie des prix, un hommage émouvant à Tawhida Ben Cheikh a été rendu – en présence de sa fille, Zeïneb Benzina Ben Abdallah, historienne et archéologue – avec la projection d’un documentaire relatant la vie de cette dame extraordinaire, première diplômée en médecine du monde arabe, qui durant toute sa vie à militer pour la cause de la femme tunisienne et très connue pour être « la toubib qui ne prend pas d’argent ». Tawhida est d’une telle modernité qu’au début des années 60, elle fonde le premier service hospitalier du planning familial ainsi que la première clinique spécialisée dans le contrôle des naissances, alors qu’en Occident, la cause des femmes n’était même pas d’actualité !
Un grand respect pour celle qui aimait dire « Jamais un bébé n’est mort dans mes mains ». Tawhida Ben Cheikh est morte le 6 décembre 2010 à l’âge de 101 ans.
Last but not least, la mairie de Paris a appelé « Centre Tawhida Ben Cheïkh » un centre de santé à Montreuil…Nul n’est prophète en son pays !!