
- société
Par Hajer Zarrouk
« La culture est salvatrice, parce qu’elle est irremplaçable pour ouvrir les esprits, les rendre plus tolérants et aussi les distraire ». Nicolas Laugero
La culture, c’est ce baromètre qui indique le degré de créativité, de raffinement et d’ouverture d’une société. Sans culture, les individus auront une conscience facilement corrompue par les appels de l’obscurantisme, de la violence et du fanatisme. Et pour cause, la culture éduque, affine le goût et ouvre les horizons de notre esprit de sorte qu’il puisse transcender au-delà du figement, de la médiocrité, de l’ordre établi et – parfois – du mal.
La culture est ainsi un organe vital pour la société : si cet organe est touché, la société entrera dans une torpeur intellectuelle et artistique implacable. Si cet organe cesse de fonctionner, la société retournera à l’état « animal ».
En Tunisie, il va sans dire que les années M’zali et, par la suite, le régime de Ben Ali ont volontairement ruiné la richesse culturelle du pays : en massifiant l’enseignement et en privilégiant les filières scientifiques au détriment de la littérature, de la philosophie et de l’art, l’Etat a contribué à créer une crise dans la production et la création culturelles.
Plus encore, le budget réservé à la promotion de la culture n’a pas enregistré de hausse considérable depuis plus de cinq ans et reste dérisoire : à peine 1,7% du budget général de l’Etat, soit l’équivalent de 177.809 millions de dinars, ont été déboursés en 2014 pour le secteur de la culture et de la sauvegarde du patrimoine (contre 1,5% en 2009), tandis que d’autres domaines bénéficient de plus de 30% du budget tels l’industrie et le commerce. A cela s’ajoute l’insuffisance de l’investissement privé qui – comme l’Etat – ne voit peut-être pas dans la culture une source de rentabilité.
Pourtant, c’est en intégrant la culture dans la logique commerciale, en boostant sa production et en lui créant un contexte favorable à la création qu’on pourrait en faire une industrie à part entière et un secteur générant des bénéfices conséquents.
En effet, pour plusieurs pays comme l’Egypte, le Liban, la France et les Etats-Unis, le meilleur outil de promotion internationale demeure la culture. Aussi, c’est le cinéma, la musique, l’architecture, les arts plastiques et culinaires qui sont vendeurs et qui attirent, chaque année, touristes et investisseurs ou bien qui poussent la « matière grise » culturelle étrangère à s’expatrier dans ces pays laissant leurs pays d’origine orphelins de culture.
La culture est donc un formidable relanceur d’économie et un révélateur de sens car, outre les avantages financiers, les effets de la culture sur la « santé » de la société sont multiples : elle crée des individus moins dépressifs, offrant une part de leur quotidien au rêve, aptes à la critique, apprenant à mieux réagir face à des situations de conflit, de révolte et d’incertitude, évoluant vers plus de dynamisme, de réflexion, mais également vers plus de sagesse et de modération.
Investir dans les salles de théâtre, de cinéma et les bibliothèques, sponsoriser sérieusement écrivains, créateurs, producteurs et artistes, accroître le budget octroyé à la culture au dépens d’autres secteurs jouissant déjà d’un financement assez important, encourager l’investissement privé dans le domaine culturel … etc., telles devraient être aujourd’hui les priorités de l’Etat tunisien afin de rompre avec des décennies de marginalisation de la culture et de créer une vraie révolution dans les mentalités.