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L’entreprenariat féminin et la présence des femmes chefs d’entreprises dans les structures syndicales nationales et régionales était au cœur d’une conférence organisée, mercredi dernier, au siège l’UTICA, par la Chambre Nationale des Femmes Chefs d’Entreprises (CNFCE). Un colloque placé sous le thème « Le renforcement de la présence des femmes chefs d’entreprises dans les structures de l’UTICA ». Y ont participé des représentants de la CNFCE mais aussi de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), de l’UTICA, de l’Ambassade de Finlande en Tunisie ainsi qu’un certain nombre de femmes chefs d’entreprises, de présidents des structures professionnelles et régionales et de responsables d’unités régionales des Femmes Chefs d’Entreprises. Dans son discours d’accueil, Mme Raoudha Ben Saber, Présidente de la CNFCE, a rappelé le rôle historique de cette structure syndicale dans l’appui des femmes chefs d’entreprises et ses efforts continus à booster le leadership féminin patronal, à encourager leur adhésion aux différentes instances syndicales et à promouvoir leur rôle dans le dialogue social. Avant de céder la parole aux autres intervenants, elle n’a pas manqué d’exprimer toute sa fierté du parcours réussi jusqu’ici de la CNFCE et sa gratitude envers toutes les femmes chefs d’entreprises, qui malgré les entraves, ne cessent de briller par leurs succès et leurs réussites professionnelles.
Une étude et des statistiques peu satisfaisantes
L’un des temps forts de cette conférence-débat a été la présentation des résultats d’une étude détaillant la présence actuelle des femmes chefs d’entreprises dans les différentes structures de l’UTICA. Menée entre novembre 2014 et janvier 2015, cette étude permet de dresser un état des lieux précis de la présence des femmes au sein du syndicat patronal et dans ses différentes instances décisionnelles, aussi bien au niveau national que régional. Présidée par Wided Bouchamaoui, l’UTICA compte un Congrès National, un Conseil National, Un Conseil Administratif, Un Bureau Exécutif, 17 Fédérations, 24 Unions Régionales, 216 Unions Locales (UL), 370 Chambres Syndicales Nationales,, 1700 Chambres Syndicales Régionales et 6 Commissions spécialisées, en plus du CNFCE et du CJD (Centre des Jeunes Dirigeants). Au niveau régional et local, le taux de femmes chefs d’entreprises varie d’un gouvernorat à l’autre, avec un taux global moyen estimé à 9,62%, soit seulement une femme sur dix élus. C’est à Tozeur que ce taux est le plus élevé (18%). En deuxième position le Kef avec un taux de 14%. Dans le Grand Tunis, ce taux oscille entre 9 et 14%. Toutefois, à Sfax, deuxième capitale économique de la Tunisie, ce taux est très faible et ne dépasse pas les 6%. Les femmes chefs d’entreprises sont essentiellement présentes dans les secteurs des services (51%), des petits métiers (20%), de l’artisanat (12%) et du commerce (12%). Par contre, on enregistre une très faible présence féminine dans les secteurs de l’industrie (5%) et du transport. Il est possible d’en déduire que les femmes investissent majoritairement dans les secteurs ne nécessitant pas un gros investissement financier et ce, pour différentes raisons.
Quasi-absence des femmes des instances décisionnelles
Par ailleurs, et concernant la présence des femmes chefs d’entreprises dans les différentes instances décisionnelles, il est clair que le taux de femmes aux postes décisionnels reste relativement faible. Ainsi, les femmes n’ont qu’un seul siège au Conseil National de l’UTICA, celui de Houda Tekaya (Manouba). Toutefois, aucune femme n’est présidente de Fédération Professionnelle ou d’Union Régionale ou encore du CJD. pour le bureau national du CJD, on retrouve une seule femme (vice-présidente) sur douze membres élus. A Nabeul et Tataouine, les bureaux exécutifs comptent deux femmes élues chacun. Toutefois, l’unique satisfaction réside dans la présidence actuelle de l’UTICA par une femme. A la lumière de ces statistiques fiables et concrètes, il sera désormais possible d’analyser avec précision la situation et de lancer différentes pistes de réflexion, notamment sur les freins entravant l’adhésion des femmes chefs d’entreprises aux postes de première responsabilité au niveau des structures de base, qui sont les passerelles vers les instances patronales décisionnelles. Une deuxième étude devrait rapidement être réalisée pour évaluer l’influence des femmes dans les structures de l’UTICA et leurs contributions dans l’amélioration des performances des structures et des instances décisionnelles ainsi qu’une troisième portant sur les besoins, les attentes et les préoccupations des femmes chefs d’entreprises. Plusieurs recommandations ont été émises à cette occasion, dont la mise en place d’un plan de sensibilisation au niveau des structures de l’UTICA sur l’intérêt d’intégrer des femmes dans les instances décisionnelles ainsi que d’un plan de communication permettant de renforcer la notoriété et la visibilité de la CNFCE et des différentes chambres régionales.
Un travail décent pour une vie digne
Au programme de la conférence organisée par la CNFCE, la présentation également du projet intitulé: « Voie à suivre après la révolution: Travail décent des femmes en Egypte et en Tunisie. » Mis en œuvre par l’OIT en 2012, il est financé par le Ministère des Affaires Etrangères de Finlande. A ce sujet, Tanja Jaaskelainen, Ambassadrice de Finlande en Tunisie, a déclaré que ce programme d’appui à l’entreprenariat féminin relevait une importance extrême car en cette période de transition démocratique que vit la Tunisie, le rôle de la femme notamment dans la résolution des problèmes sociaux, était majeur. L’ambassadrice a donné pour la Finlande en exemple, un pays décimé et ravagé par l’occupation et par guerre et qui est pourtant parvenu, à coup de sacrifices et de réformes, à devenir le pays démocratique et stable que l’on connait. Pour la diplomate, cela n’aurait jamais été possible et la transition n’aurait jamais abouti sans la participation active des femmes. C’est pourquoi il faut aujourd’hui apporter un vrai soutien logistique et matériel aux femmes tunisiennes et égyptiennes et faciliter leur intégration sur le marché du travail mais aussi appuyer leur adhésion dans la vie politique. A travers des formations, des actions sur terrain dans les zones rurales et la mise en place d’un programme structuré d’économie sociale et solidaire, le projet « Voie à suivre après la révolution: Travail décent des femmes en Egypte et en Tunisie » vise à éliminer toute discrimination au travail entre hommes et femmes en améliorant les compétences des femmes et en mettant à leur disposition les outils nécessaires afin de leur offrir la possibilité de se lancer dans la vie active et l’entreprenariat et leur garantir ainsi une source de revenus permanente et une existence digne. Le projet inclut également un volet d’appui aux institutions nationales de statistiques dans les deux pays qui permettront de produire de données pertinentes sur la participation de la femme au marché du travail.
Les jeunes au RDV
En marge de la conférence, un protocole d’accord a été signé entre la CNFCE et l’Association des Jeunes Femmes Entrepreneures de l’IHEC (AJFE) a été signé. Une étape importante pour ce club créé en avril 2014 et constitué aujourd’hui de 46 jeunes étudiantes dynamiques et ambitieuses. En signe d’encouragement pour l’engagement sérieux et productif de l’AJFE, il a également été décidé d’intégrer une représentante de l’AJFE au sein du bureau exécutif de la CNFCE. Tout au long de l’année, ce club universitaire organise conférences, débats, activités associatives, actions de sensibilisation et des ateliers de formation au profit de ses membres mais aussi des autres étudiants de l’IHEC afin de les familiariser avec le marché du travail, à améliorer leurs compétences et à les orienter vers l’entreprenariat.
Rym Elkhalil