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La maladie d’Alzheimer touche environ un million de personnes en France, dont 60 % sont des femmes, selon la Fondation Recherche Alzheimer. Cette disparité entre les sexes demeure en grande partie inexpliquée, mais une récente étude menée par le centre Cyceron à Caen apporte des éléments de réponse.
Gaël Chételat, directrice de recherche à l’Inserm et spécialiste des maladies neurodégénératives, a supervisé les travaux de Julie Gonneaud, jeune chercheuse au sein de l’équipe NeuroPresage du centre Cyceron.
Les résultats de cette étude, qui examine les différences liées aux sexes dans la maladie d’Alzheimer, mettent en lumière le lien entre l’activité physique et l’activité cérébrale.
Les hommes et les femmes ne sont pas touchés de la même manière par la maladie d’Alzheimer. Quels sont les éléments connus à ce jour ?
Nous connaissons déjà certains facteurs de risque pour la maladie d’Alzheimer, tels que l’inactivité physique, un régime alimentaire riche en graisses et un faible niveau d’éducation. Notre étude vise à mieux comprendre les spécificités liées aux sexes dans les mécanismes de cette maladie. Nous savons qu’il existe des différences entre les hommes et les femmes, mais les recherches à ce sujet sont encore limitées.
Vous venez de publier une étude sur ce sujet : quelle était sa portée ?
Julie Gonneaux s’est penchée sur le lien entre l’activité physique et l’activité cérébrale chez les personnes de plus de 60 ans. Nous avons constaté que ce lien existe tant chez les hommes que chez les femmes, mais il se manifeste différemment au niveau cérébral.
Chez les femmes, c’est le fonctionnement cérébral qui est corrélé à l’activité physique, tandis que chez les hommes, il s’agit des dépôts amyloïdes. La maladie d’Alzheimer se caractérise par deux types de lésions, l’une d’entre elles étant l’accumulation de ces dépôts. Chez les hommes, cette accumulation est ralentie par l’activité physique, ce qui n’est pas le cas chez les femmes.
On a longtemps cru que la plus grande espérance de vie des femmes expliquait ce risque accru de développer la maladie d’Alzheimer… Mais finalement, les femmes sont-elles moins protégées que les hommes face à cette maladie ?
Oui, c’est quelque chose que nous ignorions auparavant. Dans une autre étude, menée avec une autre chercheuse, nous avons examiné le degré d’anxiété, qui est également un facteur de risque. Nous avons constaté que ce risque est plus marqué chez les femmes, car leur niveau d’anxiété augmente davantage. De plus, plus les femmes présentent de symptômes dépressifs, plus leur cerveau est altéré, une corrélation que nous ne retrouvons pas chez les hommes.
Quel est l’impact potentiel de ces résultats ?
Nous espérons formuler des recommandations et conseiller des mesures préventives adaptées à chaque individu, en fonction du sexe et de l’âge. Ces résultats sont préliminaires, et il reste encore beaucoup de recherche à faire.
Par exemple, nous pourrions recommander de traiter l’anxiété chez les femmes âgées de 20 à 40 ans, et de se concentrer sur les risques cardiovasculaires chez les hommes du même groupe d’âge.