Réseaux féminins en Tunisie : la solidarité qui transforme la société
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Chaque année, le 20 novembre se dresse comme un rappel : les droits de l’enfant existent. Et pourtant, chaque année, cette même date résonne comme une contradiction violente avec la réalité. Parce que les enfants — ceux-là mêmes que nous prétendons protéger — continuent d’être les premières victimes d’un monde qui, trop souvent, oublie ce que signifie “grandir”.
L’enfance, censée être un refuge, s’est transformée en champ de bataille. Pas seulement dans les zones de conflits armés. Pas seulement dans les pays dits « fragiles ». Non — partout. Dans nos rues, dans nos écoles, dans nos foyers, dans les écrans, dans les silences. Les violences envers les enfants ne sont pas un phénomène lointain : elles sont systémiques, enracinées dans nos cultures, parfois même justifiées au nom de traditions ou de normes sociales dépassées.
Dans un monde qui avance à une vitesse vertigineuse, l’enfance est devenue une variable d’ajustement. Les guerres éclatent, les économies s’effondrent, les crises se succèdent. Et dans chaque crise, ce sont les enfants qui trinquent en premier.
Ils deviennent invisibles, statistiques, dommages collatéraux, “réalités complexes” dans le langage politiquement aseptisé des rapports internationaux.
Pendant que certains débattent de cessez-le-feu, de gouvernance ou de géopolitique, des enfants — à Gaza, en Syrie, au Soudan, en RDC, en Ukraine et ailleurs — apprennent trop tôt ce que même un adulte ne devrait jamais voir : la mort, la peur, la faim, l’absence.
Mais faut-il vraiment aller si loin ?
Il suffit parfois de regarder autour de soi :
des enfants battus dans le silence des familles,
des enfants humiliés dans les salles de classe,
des enfants harcelés dans la jungle numérique,
des enfants négligés, ignorés, à qui l’on demande de “faire avec”.
On dit qu’un enfant s’adapte. C’est vrai.
Mais à quel prix ?
Un enfant s’adapte parce qu’il n’a pas le choix. Parce qu’il dépend entièrement de la société qui l’entoure. Et notre société, aujourd’hui, les trahit souvent.
L’impact des violences — physiques, psychologiques, sexuelles ou structurelles — n’est pas temporaire.
Il s’imprime dans le cerveau, dans le comportement, dans la vision du monde.
Il fabrique des adultes cassés, anxieux, méfiants, en lutte avec eux-mêmes.
Et nous nous étonnons ensuite de voir tant de fractures sociales, tant de crises émotionnelles, tant de solitudes.
Ce n’est pas un manque de lois. Elles existent.
Ce n’est pas un manque de principes. Ils sont écrits depuis 1989.
Ce n’est même pas un manque de ressources — c’est un manque de volonté, de cohérence, de priorité.
On protège ce qu’on aime.
On protège ce qu’on respecte.
Alors pourquoi accepte-t-on que des enfants soient exposés à la violence quotidienne comme à une fatalité ?
Pourquoi avons-nous normalisé l’idée que certains enfants auront une enfance… et que d’autres n’y auront jamais droit ?
La Journée internationale des droits de l’enfant ne devrait pas être un rituel symbolique ou une campagne “mignonne” sur les réseaux.
Elle devrait être un miroir. Brutal.
Un miroir qui nous oblige à reconnaître ce que nous avons échoué à faire.
Protéger l’enfance est un choix politique, social, moral.
C’est un acte de courage.
C’est mettre l’enfant au centre de nos décisions, et non à la marge de nos préoccupations.
C’est refuser que l’innocence continue d’être sacrifiée sur l’autel de la négligence, du conflit ou de l’indifférence.
Et tant que le monde ne comprendra pas que protéger l’enfance n’est pas un luxe mais une urgence, nous resterons une humanité incomplète.
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