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Syndrome de la bonne élève : ce piège silencieux qui freine les femmes au travail

  • Syndrome de la bonne élève : ce piège silencieux qui freine les femmes au travail

Elles font tout « comme il faut », avec sérieux, rigueur, discrétion. Diplômées, compétentes, investies, elles cochent toutes les cases… sauf une : l’audace de se mettre en avant. Dans les entreprises, les universités, les ministères comme dans les startups, le constat se répète : trop de femmes s’auto-limitent sans même en avoir conscience.

En cause ? Ce que les sociologues et les expertes en genre nomment aujourd’hui le syndrome de la bonne élèveun conditionnement social profondément féminin qui pousse à chercher la perfection, l’approbation, la légitimité totale avant d’oser. Un frein silencieux… mais redoutablement efficace.


 Quand l’excellence devient un piège

À première vue, rien de plus valorisant que d’être une « bonne élève ». Mais derrière ce compliment se cache souvent un modèle rigide de conformité, hérité de l’enfance et renforcé par l’école :

  • Ne pas déranger.

  • Ne pas se tromper.

  • Attendre qu’on nous donne la parole.

  • Travailler dur, sans revendiquer.

Et ce qui fonctionne à l’école devient vite un poids en entreprise. Car le monde professionnel ne récompense pas toujours le mérite silencieux, mais la stratégie, la prise de parole, la visibilité.

« On m’a toujours dit que mon travail parlerait pour moi. Mais à 35 ans, j’ai compris que je devais parler pour moi aussi. »
Hela, ingénieure à Sfax


 L’autocensure féminine : une forme invisible d’inégalité

Le syndrome de la bonne élève ne se résume pas à un manque de confiance. Il s’agit d’un mécanisme complexe d’autocensure, souvent nourri par :

  • une peur du jugement,

  • une crainte de ne pas être « légitime »,

  • une éducation genrée où on valorise la discrétion chez les filles et l’audace chez les garçons,

  • et un monde du travail encore dominé par des normes masculines.

Des études ont montré que les femmes postulent moins que les hommes à une offre d’emploi si elles n’ont pas 100 % des compétences requises. Les hommes se lancent avec 60 %. Ce n’est pas une question de capacité, mais de conditionnement.


 Un syndrome universel… qui prend des formes culturelles

En Tunisie comme dans tout le Maghreb, le phénomène est accentué par le poids des attentes sociales :

  • Être « modeste »,

  • Ne pas faire trop de bruit,

  • Ne pas paraître prétentieuse ou dominatrice,

  • Garder une image « respectable ».

« Une femme ambitieuse est encore souvent perçue comme égoïste, voire agressive. Il faut déconstruire ça. »
Myriam Amri, coach en leadership féminin

Dans les entreprises, cela se traduit par moins de candidatures féminines à des postes à responsabilité, moins de négociations salariales initiées par des femmes, et parfois même… une absence de réaction face aux injustices subies.


 Désapprendre pour mieux se révéler

Sortir de ce schéma demande un travail intérieur, mais aussi un soutien collectif. Il ne suffit pas de dire aux femmes « affirmez-vous ». Il faut :

  • changer les référentiels managériaux,

  • former les recruteurs à repérer les biais,

  • normaliser les parcours imparfaits,

  • visibiliser les rôles modèles féminins, dans le Maghreb comme ailleurs.

Certaines entreprises tunisiennes commencent à intégrer ces enjeux dans leurs politiques RH. Mais le changement profond viendra aussi des femmes elles-mêmes, en acceptant de se montrer incomplètes, en progrès, ambitieuses, audacieuses — et humaines.


 Briser le réflexe du mérite silencieux

La prochaine fois qu’une femme hésite à postuler, à demander une augmentation, à prendre la parole… qu’elle se rappelle ceci :
le monde n’est pas un examen. Il est une scène. Et il ne suffit pas de bien répondre — il faut aussi lever la main.

Chez Femmes Maghrébines, nous croyons que le mérite ne doit plus être silencieux. Il est temps d’oser, de parler, de prendre sa place — même sans être « parfaite ».

« Tu n’as pas besoin d’être prête pour oser. Tu as besoin d’oser pour être prête. »

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