Arrête d’attendre. Personne ne viendra te sauver…
- société
Dr Rejeb HAJI
« On ne bâtit rien avec la haine, la rancune ou l’esprit de vengeance. Il est plus facile de résister à la répression, aux souffrances physiques que de dominer les entraînements de ses passions. La véritable guerre sainte, le Jihad-el-akbar, c’est la guerre contre ses mauvais instincts.»
Habib Bourguiba-La Tunisie et la France
Il ne se passe pas un jour, où l’on ne nous rabat pas les oreilles que la révolution de 2011 et sa transition politique ont été saluées par le monde entier et régulièrement citée en exemple. On va jusqu’à nous proclamer que l’on a inventé un nouveau modèle de démocratie.
Quelle indécence ! Des réformes de structures, nous dit-on ont été lancées par les gouvernements successifs, souvent à la recherche du paraître dans sa forme la plus abjecte, celle de « l’effet de com. ». Il faut les chercher à la loupe, ces réformes proclamées. Il est vrai, qu’on a créé un poste de Ministre chargé des réformes Majeures, une nouveauté unique dans un monde, où la révolution numérique attrape même les plus avertis. S’il est vrai que des centaines de ministres, dans sept gouvernements successifs, pour un petit pays aux ressources naturelles limitées, ont plongé le pays dans le cauchemar de l’endettement et dans la remise en question de son indépendance.Tout est permis pour ceux qui ont raflé le pouvoir et asséché les caisses de l’Etat, sous un voile qui sera sans doute levé un jour.
Depuis sept années, le mensonge n’a fait que continuer l’œuvre d’un dictateur, parti aux abois, celui-là patenté, avec l’aide de ses acolytes, dans les règlements de compte. Le double langage a, depuis, prospéré à loisir. Le ventre affamé n’a pas d’oreille et s’est traduit aujourd’hui, sous plusieurs formes. Une non-participation aux urnes en est un exemple. Ce refus d’aller voter, chargé de signaux, est inquiétant pour ceux qui nous gouvernent et qui cherchent, comme toujours, des arguties pour se disculper de leur responsabilité. Il faut avoir la culture de l’échec et l’assumer. Nous avons attiré l’attention, dans nos différents articles, de ceux qui ont pris en charge notre destinée. Mais comme tout ce qui dérange, il faut fermer ses soupapes.
Ce fut le choix des nouveaux venus à la direction d’un journal aussi historique et prestigieux que « La Presse ». Ils ont censuré les « rubriques » et les « Opinions » pour mieux plaire et s’approcher du pouvoir. Alors que c’est un journal gouvernemental qui appartient à tous et ne devrait aucunement être sous la coupe d’une quelconque confrérie. Ce journal, il ne faut pas l’oublier, est financé par nos impôts et sans l’aide de l’Etat, sa mort serait programmée et certaine. Il faut le sauver en urgence de ses prédateurs, en manque de notoriété! Comme dans d’autres domaines, les défis sont de taille.
Comment, au vu des résultats affligeants de cette consultation électorale, oser concevoir l’avenir ? Depuis des années, l’obsession de conquérir le pouvoir, à tout prix, a ruiné le pays et amplifié sa crise. Les indicateurs économiques toujours au rouge, à la recherche d’une stabilité politique qui tarde à venir. Notre économie souffre de ses gouvernants. Loin de la transparence, leurs déclarations de revenus tardent à être publiées. Les grandes transformations numériques, culturelles et écologiques ne sont pas à la portée de partis souvent sans troupe et sans feuille de route traçant les contours d’une vision du futur. Des coalitions hétéroclites et un partage du pouvoir, c’est une expérience dont l’échec est patent et confirmé.
Seul un tunisien sur trois s’est déplacé pour voter alors que le vote est un droit mais également un devoir civique. Une mosaïque ingouvernable est sortie des urnes. Même le responsable de l’ISIE, dont l’organisation budgétivore s’est caractérisée par une faiblesse à toute épreuve, se manifeste, aujourd’hui, en appelant à modifier la loi électorale dont il était un des garants, alors que nous l’avons suggérée depuis des années, mais nous n’avons pas été entendus. Les conséquences de ces élections pour instituer un pouvoir régional seront terribles.
Il faut avoir le courage d’en mesurer les effets. Une modification de la constitution, la meilleure du monde selon ses défenseurs, s’impose et l’Histoire nous rappelle l’urgence d’agir avant l’effritement du pays et le retour aux tribalismes d’antan. Ses conséquences sociales seraient également incalculables. Rien n’est plus opposé au bon sens que de feindre ignorer la vérité de l’agonie du pays, chef d’œuvre de la troïka et des coalitions successives. L’aveuglement des politiques a ruiné les espoirs des jeunes que l’indifférence gagne, alors qu’ils devraient prendre le flambeau et aller de l’avant pour poursuivre la construction de l’Etat moderne, tant rêvé par les martyrs à travers les révolutions et les âges. Les tunisiens ne sont pas dupes ; ils savent bien que la politique n’a rien réglé, ni amélioré leur situation. La lutte contre le chômage n’est même plus évoquée comme priorité dans les choix actuels. Le marché du travail est malade et le taux de chômage s’est installé dans la durée.
C’est un terreau favorable à la radicalisation et à l’extrémisme. Ajouter à cela, la peur de la perte de l’emploi et de l’insolvabilité des caisses de retraite. Tout cela se diffuse à l’ensemble de la société. Notre destin est devenu lié à la conjoncture économique. Il faut réinventer un autre idéal celui de fournir à chacun ce dont il a besoin. La solidarité aurait alors une nouvelle signification, celle que peut apporter chacun à la collectivité. La misère n’est pas aujourd’hui dans nos régions un risque mais une réalité à laquelle il faut imaginer des solutions moins coûteuses et plus efficaces. Avec le coût exorbitant des soins, la maladie nous rattrape et détruit notre système de santé. Avec les 14 chaînes de télévision, les 44 chaînes de radio et les 85 quotidiens et hebdomadaires, la scène médiatique a explosé comme d’ailleurs les partis et les organisations non gouvernementales.
Tout ce beau monde joue-t-il, en réalité, son rôle conformément à ses statuts et aux lois de la république, pour le bien du pays ? Nul ne peut l’affirmer. En commandant des sondages à des entreprises hors la loi, on aurait, à l’évidence, une réponse affirmative. Il faut savoir tirer les leçons avant qu’il ne soit trop tard.
Le bras de fer est engagé entre les électeurs et les gouvernants. Ca suffit de sauver les apparences. Une prise de conscience collective s’impose pour chercher d’autres voies et réparer les dégâts. Il faut diriger la cité avec clairvoyance et sagesse. C’est, à mon avis, le nouveau combat pour sauver « le nouvel Etat ». Le pays a un désir de changement. Pour sortir le pays de sa torpeur, il nous faut des gouvernants qui, comme l’écrivait feu Mohamed Sayah dans « le nouvel Etat », à propos de Bourguiba, se caractérisent par « le dévouement total avec ce qu’il comporte de disposition aux sacrifices de toutes sortes, non seulement d’ordre matériel mais moral aussi, sans autre souci que l’intérêt de la cause nationale.» et il ajoute qu’ils doivent avoir « un sens aigu de l’efficacité, un niveau intellectuel élevé, une vaste culture et une connaissance approfondie de la politique et des problèmes de la société, le tout allié à une grande lucidité permettant de prendre de bons choix, au bon moment.»
Suite à cette faible participation élective et pour une plus grande cohésion nationale, il faut chercher à provoquer un éveil des consciences, en inspirant l’exemplarité. C’est de là que naîtra l’ardeur à la résistance, le goût de l’effort et le souci de corriger les faiblesses. Il est temps d’être au diapason de l’évolution universelle et de ne pas tarder à reprendre le train en marche vers le progrès. C’est le pari à prendre pour aujourd’hui comme pour demain !
*Dr d’Etat en économie, Dr en statistique, Diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris, Diplômé de l’Institut de Défense Nationale (4ième promotion), Chef de cabinet de Mohamed Sayah, Premier maire de Melloulèche, Formation à Harvard University …
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