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Des sujets qui dérangent et d’autres qui sèment le doute !?

  • Des sujets qui dérangent et d’autres qui sèment le doute !?

 
Par Dr  RejebHaji

Dr d’Etat en économie, Dr en statistique, Diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris, Diplômé de l’Institut de Défense Nationale (4ième promotion), chef de cabinet dans plusieurs ministères…

 « L’unité nationale ne saurait rester une simple enseigne, un slogan creux. Il faut l’organiser, la traduire dans la réalité quotidienne, à tous les niveaux de la responsabilité, pour lui assurer succès et pérennité et lui permettre de porter ses fruits. »                                                                                                                                          -Habib Bourguiba  – Conférence des partis africains,  juillet 1975-

Les évènements se succèdent ces dernières semaines, dans un contexte international où l’incertitude et l’instabilité sont les principaux catalyseurs. Dans le court terme, l’édification de la paix et de la prospérité semblent de plus en plus difficiles à réaliser. Pour le long terme, il est difficile de les prévoir puisque comme Keynes aimait à dire,avec ironie,  « à long terme, nous serons tous mort ».
Comment stopper les rumeurs et venir à bout de la désinformation ? Telles sont les priorités du moment, quelle que soit la politique menée où qu’elle soit. Le monde médiatique abuse de la crédulité des politiques et jette sur eux le discrédit.
Pour mon pays de grands sujets me traversent l’esprit: certains sèment le trouble et d’autres annoncent des dérives vers l’inconnu.
Le premier a trait à l’inscription de la Tunisie sur une liste noire de « 17 pays considérés comme des paradis fiscaux » par les 28 ministres des finances de l’UE réunis à Bruxelles, le mardi 5 décembre 2017. « Au total, 216 pays et territoires ont été recensés. Environ 90, susceptibles de représenter une menace fiscale pour les pays européens, ont ensuite fait l’objet d’une enquête approfondie. Sur la base de ces enquêtes et du dialogue entre le groupe de travail de l’Euro-groupe et les administrations fiscales de ces territoires, la liste noire des paradis fiscaux a, in fine, été constituée. » Les critères retenus pour ce classement sont principalement l’existence d’impôts insignifiants, l’absence de transparence sur le régime fiscal et l’absence d’échanges de renseignements fiscaux avec d’autres Etats.
Certes des possibilités de marchandage, avec appui et intervention de la Banque mondiale, demeurent possibles pour sortir le pays de ce nouveau gouffre. Il est à rappeler que cette même Banque a signé avec la Tunisie une convention de 52,7 millions d’euros, à un taux de 1%, avec 5 ans de grâce « pour le développement d’économie inclusive dans les régions défavorisées.» Elle est le gendarme qui veille au grain et qui suit régulièrement l’application des accords signés du nouveau PAS  (Programme d’Ajustement Structurel) auquel la Tunisie a souscrit. La réponse de nos gouvernants à la liste noire et à son origine se fait attendre !Une nouvelle orientation et pourquoi pas une nouvelle équipe deviennent urgentes et nécessaires pour sauver les meubles et éteindre le feu.
Au Président de la République qui se bat sur tous les fronts de sauver encore la mise !
 
Un autre volet qui sème le trouble est celui relatif  au résultat des élections d’un député représentant des tunisiens en Allemagne où les électeurs ont rejeté les alliances contre nature et se sont peu mobilisés.
Sur 26000 inscrits, 1300 seulement ont pris part au vote, soit 5% alors qu’ils étaient 7000 en 2014. Une alerte qui devrait être analysée pour les élections futures. Il est vrai que les partis, comme la plupart dans le monde, sont  aux abois.Cet exemple récent où l’absentéisme est devenu la règle, est une alerte pour tous et mérite de s’y attarder pour en tirer  les conclusions qui s’imposent ! La création d’une Haute autorité pour la transparence de la vie publique devient une urgence. Elle pourrait, comme en France, être « chargée de recevoir, contrôler, avec l’administration fiscale  et publier les déclarations de situation patrimoniale et les déclarations d’intérêts de certains élus, membres du gouvernement, collaborateurs et dirigeants d’organismes publics.»
Un autre événement et non des moindres, est relatif à la transformation du quotidien ESSARIH en hebdomadaire, dans le but et il faut l’espérer, de reprendre le souffle et faire comme un roseau, qui plie mais ne casse pas. Il est inadmissible en fait que le Président de La République, le promoteur de « l’exception tunisienne », laisse mourir un moyen d’information indépendant du pouvoir d’argent et crédible. On  affaiblit ainsi la forme républicaine dont il est le chantre. Alors que le pouvoir politique est sans réaction, la scène médiatique va perdre, à coup sûr, un pionnier.
D’autres évènements comme celui de la relation de notre pays avec les Emirats unis et même la visite du Président turc ne nous laissent pas indifférents. Nous aurons le temps d’y revenir avec plus de détails.
Le report  à  plus tard des élections municipales déchaîne les passions alors que leur renvoi en 2019 serait une bonne décision. Il faut laisser mûrir la décentralisation, telle que prévue par la constitution. D’ailleurs, il est fort peu probable qu’elle puisse être poursuivie en l’état. Ses risques seront graves pour un pays en quête de nouvelles solidarités agissantes.
Le rôle de l’Etat ne sortirait pas renforcé pour corriger les inégalités. Au contraire, elle exacerberait à coup sûr les inégalités là où elles devraient être réduites.  Il faut éviter les fausses réformes et les promesses sans lendemain. L’enjeu n’est pas de fractionner le pays mais d’asseoir son unité autour d’une vision crédible! Le numérique, la voie de l’avenir,  où chacun peut avoir sa place, peut y aider.
La priorité pour notre pays, demeure, aujourd’hui, la diminution du chômage. Un regroupement de toutes les structures existantes et la création d’un guichet unique qui  aurait en charge des pôles d’emploi, serait d’un grand secours pour créer une base fiable. Il agirait comme une météo de l’emploi dans toutes les régions de la République.
A l’heure d’internet, tout le monde voit tout et se compare avec le reste du monde. La révolution spontanée  du peuple tunisien repose sur une unité nationale telle que décrite, plus haut, par le Président Bourguiba. Elle a résisté aux crises et aux soubresauts.
La sécurité de tous ne tardera pas à être assurée et l’effort poursuivi dans cette voie est un garant contre les menaces intérieures et extérieures qui guettent  la révolution. La coordination avec l’armée ne fera que renforcer la confiance du citoyen pour  rebâtir son économie, refaire fleurir son tourisme, trouver de nouveaux débouchés pour ses chômeurs et inventer un nouveau système politique qui serait une garantie contre le conservatisme, quelle que soit son origine.
Pour conclure, La Tunisie que nous aimons et que nous avons servie avec droiture et rigueur,  ne doit pas tourner à vide. Notre histoire a fait de nous ce que nous sommes, des enfants de l’Etat moderne capables de défier les  listes noires. Un bel héritage à protéger de certains qui font le choix d’enfourcher la cause révolutionnaire au profit de leur parti et de leurs idées rétrogrades.
Même si le modèle est en crise et même si on assiste à des flots de sociétés  civiles et de partis politiques de finances inconnues et contestées, le peuple continuera « son ébullition » pour dominer sa situation catastrophique de surendettement et de soumission à la vindicte de l’Etranger. Seul le recours aux hommes d’action et à l’intelligence des tunisiens pourraient remettre le pays en mouvement.
L’histoire est là pour renforcer la conscience collective de la société. Le dénominateur commun qui nous unit et qui mérite d’être renforcé en cette période de crise, c’est celui  de « rendre notre révolution plus crédible, notre pays plus viable et plus agréablement vivable ». Les marqueurs seraient alors  la probité, l’obligation de l’exemplarité et de l’éthique. Certains politiciens, de droite comme de gauche,  veulent nous faire douter de ce que nous sommes, alors qu’ils ont pris le pouvoir  pour mener le pays là où il est, proche de la déshérence !
A certains qui avaient assumé des responsabilités dans les gouvernements successifs  d’après la révolution « seul le silence est grand tout le reste est faiblesse ! ». Ils ont tout abîmé : le politique, l’économique et le social. Ils devraient s’expliquer et en rendre compte, au lieu de se disculper par voix interposée. Le pays économiquement et politiquement à genoux paie cash leurs politiques désastreuses. Il lui faut un électrochoc pour s’en sortir!
Le réveil des consciences obligera, à ne pas en douter,  non à créer des hommes providences mais  à parler vrai et à ne pas éviter les sujets qui fâchent et qui sont de réels enjeux : le cumul des mandats, le pouvoir des binationaux, l’endettement, l’argent parallèle, l’emploi, l’inflation… même la constitution, jugée en son temps, par ses auteurs comme  « la meilleure du monde », alors qu’elle est aujourd’hui le problème !
Le chemin à suivre est loin d’être balisé et le jugement portera, en définitive, sur les actes et non sur les intentions aussi louables soient-elles !
R.H.
 
 
 
 
 
 
 

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