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Mettre la vérité toute crue sur la table pour que la Tunisie réussisse !

  • Mettre la vérité toute crue sur la table pour que la Tunisie réussisse !

 
Par Dr HAJI  Rejeb
« L’aide étrangère, pour être acceptable pour notre amour propre, doit constituer un complément et un appoint. D’ailleurs, elle sera d’autant plus importante que notre effort aura été plus conséquent. »

                                                                                                     Habib Bourguiba –Tunis le 4 Novembre 1960

De tout temps le laxisme monétaire et le recours systématique à l’endettement ont conduit à des situations macroéconomiques catastrophiques, c’est le cas de notre pays.
A partir de l’année 1987, un pouvoir dictatorial et abject s’est emparé du pays pour le soumettre à une mafia de trafiquants et de spéculateurs. Son économie s’est dégradée, à travers le temps. Outre l’accentuation du seuil de pauvreté, le pouvoir d’achat de la classe moyenne s’est dégradé. Le recours à l’endettement devenant pour les gouvernants d’alors une nécessité. La situation  économique de notre pays est semblable et on a recours, aujourd’hui comme hier, à  l’appui des institutions financières.
Le Fonds Monétaire International nous propose un programme d’ajustement structurel (PAS) qui ne dit pas son nom. De quoi s’agit-il en fait ? C’est un programme composé de deux volets.
Le premier consiste à prendre des mesures conjoncturelles. Le budget de l’Etat joue traditionnellement ce rôle. En période de récession, la chute des recettes fiscales a pour conséquence la détérioration du déficit d’où l’obligation du maintien des dépenses afin de stabiliser la conjoncture. On a recours alors à une  politique budgétaire et monétaire restrictive pour comprimer la demande intérieure et rétablir les « grands équilibres macroéconomiques » qui consistent à maîtriser l’inflation, les finances publiques et l’équilibre extérieur mais également à réduire les besoins d’emprunt, à stabiliser les taux de change et à dégager des excédents  pour rembourser les dettes.
Le deuxième volet concomitant est un ensemble de mesures structurelles à savoir privatiser les entreprises publiques, promouvoir la concurrence, faire reculer la sphère publique,  ouvrir et libéraliser à outrance l’économie.
Ce sont ces mesures dictées par le Fond Monétaire International (FMI).Généralement en cas de crise, les Etats recourent à la planche à billets. C’est le remède indiqué par les économistes à la déflation. Par ce biais, la BCE a pu secourir l’économie grecque et soutenir l’économie espagnole. Cette manière de procéder par stimulation monétaire a été le crédo politique des dirigeants de la Banque centrale, ces dernières années. Le gouverneur actuel dirige la BCT comme il le faisait à la BAD et aux chercheurs d’évaluer les résultats !
Dans une stratégie anti-crise, comment  sauver les grands équilibres macroéconomiques ?
Le budget 2018, selon les dernières indiscrétions, n’est pas un signal de démarrage d’une nouvelle politique: les dépenses de l’Etat sont-elles réexaminées en fonction des priorités retenues ?
Propose-t-il des solutions pour limiter la dégringolade du dinar ?
Le dinar va-t-il devenir une monnaie de singe  c’est-à-dire ne plus avoir de valeur réelle  correspondant à la richesse produite  ou induite ?
Qu’en est-il au juste des rumeurs sur les nouveaux billets mis en circulation ?
Va-t-il instituer le recours à la dette pour colmater les brèches et minimiser les dettes qui frôlent les 70% du PIB ou encore les orienter vers l’investissement créateur d’emplois ?
Financer les grands projets et continuer à payer les salaires des fonctionnaires, seraient-ils la ligne de la nouvelle politique sous-jacente imprimée dans le budget ?
L’utilisation de la  planche à papier est-elle prévue pour continuer à indemniser les martyrs « des élus du peuple » ?
Le dernier remaniement ne le prouve pas. Il adresse aux investisseurs que les postes économiques clés sont détenus par Ennahdha, que les futurs gouvernants sont des novices sans curriculum vitae, ni déclaration de revenu déposée à la cour des comptes. Ajouter à cela que les partis de la coalition ne font que distribuer des postes.
Les ministres,les secrétaires d’état et leurs cabinets pléthoriques proviennent souvent de cette mouvance. Ils ont été formés par un parti et ses organisations de jeunes et d’étudiants. Ils n’y ont pas appris à travailler les dossiers mais à  rédiger des motions et organiser des rassemblements. Le système politique avec le temps s’est donc dégradé, ces dernières décades. Les institutions se sont déconnectées de la réalité du pays.
Les femmes, les jeunes et les catégories socioprofessionnelles y sont peu représentés.S’il est acceptable d’augmenter le budget des Ministères de la défense et celui de l’intérieur, par contre ceux de la Présidence, du gouvernement et  de l’ARP devraient être réduits, en période de crise, voire de récession. Les institutions qui n’ont pas présenté leur rapport d’activité devraient être exclues de la manne budgétaire prévue pour 2018. Alors qu’on demande aux citoyens plus de sacrifices et plus d’efforts, certaines nouvelles taxes introduites dans la loi s’inscrivent dans le dérisoire et ne sont d’aucun secours. L’introduction d’une cotisation obligatoire en fonction du revenu ne fera qu’amputer la consommation et par suite amplifier la dégradation de la classe moyenne.
Une nouvelle pression fiscale  mettra à mal les salariés qui seraient soumis ainsi à un niveau de contribution élevé, sans commune mesure avec celui des autres catégories : banques,  assurances, sociétés de télécommunication…S’il faut serrer la ceinture l’exemple doit venir d’en haut par une transparence dans les émoluments et les dépenses.
Le don de deux cents millions de dinars de l’UGTT pour la réfection des écoles doit être applaudi à sa juste mesure et on aurait souhaité la même destination du montant du prix Nobel !Quel beau programme lorsque les citoyens réclament le retour  à l’économie d’avant  la révolution ! Ce serait alors  bonjour les dégâts ! Il aurait mieux valu « appeler un chat un chat » et «  mettre la vérité toute crue sur la table », c’est la voie choisie par Omar el Khattab.
Parler du budget comme un volet d’une  politique de rigueur ou d’austérité : Deux termes évoquant d’ailleurs tous deux la sévérité et la dureté. La distinction entre eux n’existe pas chez les économistes. A telle enseigne que leur différence est celle « qu’il y en a entre un chameau et un dromadaire quand on s’apprête à traverser le désert ! »Ni la distinction du gouverneur de la banque centrale  ni la photo du journaliste avec l’ambassadeur américain ni les petits gâteaux qui vont remplacer  les truffes au chocolat de l’ambassadeur de France ni la construction du parc solaire du sud ni la nouvelle échéance des élections municipales…, ne pourraient constituer le coup de pouce nécessaire  pour sortir le pays de sa crise et donner à la jeunesse un cap et une espérance !

H.R.   Dr en économie, Dr en statistique, Diplômé de l’IAE

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