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Réconcilier les Tunisiens et leur rendre la confiance !

  • Réconcilier les Tunisiens et leur rendre la confiance !

Par Rejeb  Haji*
« Il ne faut avoir aucun regret pour le passé, aucun remords pour le présent, et une confiance inébranlable pour l’avenir. »
                                                                                                                                                            Jean Jaurès
 
Les électeurs français viennent de confirmer leur démarche. Ils ont donné une majorité absolue à leur nouvelle étoile :unPrésident hors du commun. Deux records historiques au cours de cette élection : Le premier,  celui de la présence des femmes élues (38,65% de l’ensemble et 47% pour le parti de Macron) et le second le taux d’abstention  56,37%. Différent de ses prédécesseurs, le nouveau Président  compteagir.Dans son livre « Révolution C’est notre combat pour la France »(publié en novembre 2016), il décrit, à juste raison, les problèmes actuels de la France qui sont ceux, en fait, du monde entier. Il écrit: «  Nous sommes entrés dans une nouvelle ère. La mondialisation,le numérique, les inégalités croissantes, le péril climatique, les conflits géopolitiques et le terrorisme, l’effritement de l’Europe, la crise démocratique des sociétés occidentales, le doute qui s’installe au cœur de notre société : ce sont les symptômes d’un monde en plein bouleversement. ».
Nous avons reproduit  cette citation pour la simple raison qu’elle  cerne, avec objectivité, tous  les problèmes que nos « politicards » sont incapables de brosser. Pour certains confortablement installés, l’heure pour eux est aux déballages. Ils sont dans la nasse. Ils feignent d’ignorer que  la situation économique se dégrade de plus en plus et qu’un vent de panique souffle partout sur le monde. On peut se réjouir, encore aujourd’hui de notre révolution, qui nous a offert le droit de s’organiser, de contester, d’écrire et de rêver pour militer autrement. Mais également, on peut s’inquiéter du manque de projets et de programmes.  Les anniversaires de la révolution se succèdent et aucune pertinence de l’avenir d’un futur proposé. L’objectif pour  certains  est le paraître dans leur suffisance, alors qu’ils ne sont plus en phase avec une révolution populaire sur laquelle ils n’ont jamais eu de prise réelle. Certains élus du peuple se rebiffent et veulent avoir leur part du gâteau, en dépit de l’assèchement des moyens et de la rareté des ressources. Ce qui est paradoxal c’est  qu’ils  sont les mieux placés pour le savoir.Il est possible d’observer les actes, d’entendre les paroles mais la trahison, le mensonge nous sont celés dans un fouillis de promesses ou de critiques sans aloi.
Ici et là,avant l’heure, des candidatures, à la conquête du Pouvoir Suprême se manifestent. Comme toujours, ces âmes candides promettent le meilleur des mondes possibles.Certaines oubliant parfois qu’elles étaient soit des émissaires soit des exécuteurs d’ordre du comploteur et de ses barbouzes. Le tableau politique  dépeint, toujours rose est plutôt inquiétant.L’économie du pays est en très mauvais état. Les principaux indicateurs économiques le prouvent. Fait cocasse la disparition de l’autorité de l’Etat au profit des syndicats et de quelques  partis politiques sans programmes pour le pays ni vision pour son avenir. Un grand nombre de ministres et leurs cabinets pléthoriques, peu professionnels et peu au fait de l’évolution du monde, tirent les marrons du feu.L’objectif étant pour eux la durée pour s’assurer d’une retraite dorée.
A l’heure des difficultés qui s’accumulent et de la confusion qui règne,pourquoi Le premier ministre n’impose-t-ilpas, à court terme,  une méthode de travail gouvernemental à son équipe où il clarifie, à l’exemple du Premier ministre de Macron, le travail « exemplaire, collégial et efficace ». Nous citons ci-après quelques recommandations qui nous semblent pertinentes. « L’effectif d’un cabinet de ministre est de dix, celui d’un ministre délégué de huit et celui d’un secrétaire d’Etat de cinq. »… « Les membres des cabinets ministériels sont soumis à des obligations de déclaration d’intérêts et de patrimoine. Un membre de cabinet ministériel ne respectant pas ces obligations s’exposerait notamment à des sanctions pénales.»…Il leur demande  d’ « organiser des méthodes de travail efficaces avec les directeurs d’administration centrale.»… Pour plus de détails se référer à la circulaire publiée au JORF n°0123 du 25 mai 2017.
Pour le long terme, il ne faut pas oublier que le droit d’inventaire est plus qu’une exigence. Toutes ces commissions qui dépensent l’argent du contribuable et qui fonctionnent parfois hors la loi, doivent être soumises à un contrôle strict, tant au point de vue des dirigeants que du point de vue financier. Evaluer des années d’amalgame d’idées où se côtoyaient « copains et coquins » et mesurer une politique de courte vue, basée sur des chiffres peu orthodoxes trouvant appui auprès d’organismes internationaux, au demeurant,  les véritables acteurs. Tout cela a conduit à un mélange explosif  reconnu par tous : chômage endémique, corruption généralisée, intérêts particuliers faisant main basse sur l’Etat, économie parallèle florissante, économie réelle en berne, « dégagisme » avec et sans raison… Mesurer l’ampleur des dégâts avec lucidité et responsabilité  puis proposer des remèdes devient l’affaire de tous. Pour engager les élites dans ce travail exaltant, à l’instar d’autres pays, il faut s’organiser et pourquoi ne pas rêver de reprendre l’idée  d’ « une commission d’évaluation et de perspective de sauvetage de l’économie tunisienne »  que nous avons proposée dès mars 2011 (voir La Presse de la même date).
Imaginons pour cela, une mission paraphée à la fois par Le  Président de La République, par Le Premier ministre et par le Président de l’Assemblée  chargeant une personnalité tunisienne reconnue et confirmée pour sa probité et l’excellence de son œuvre, lui fixant à titre indicatif deux domaines de réflexion : une évaluation de la situation économique et des propositions concrètes de réforme.
Imaginons que l’heureux élu s’entoure d’une cinquantaine d’élites tous volontaires, à titre individuel, ne percevant aucune rémunération de quelque nature que ce soit et provenant de toutes les composantes de la société civile (universitaires, avocats, médecins, ingénieurs, cabinets d’études, de conseils, administration, journalistes..). Faisant confiance à l’esprit et à l’intelligence, cherchant, dans le dialogue et la confrontation des idées, les moyens pratiques pour sauver l’économie et dessiner  une société de participation, tel sera le cadre de son travail.
Imaginons qu’elle édite des lettres d’information sur le déroulement de ses travaux et remette son rapport au Président de La République, à son Premier  ministre et au Président de l’Assemblée,dans un délai de trois mois.
Imaginons tout cela dans le cadre d’une concertation élargie et appropriée. De ces travaux naîtra un guide, capable de faire un état de l’existant et de présenter quelques axes susceptibles d’être médités par les hommes politiques pour une relance du développement durable. Il serait alors un socle pour réconcilier les tunisiens et pour leur rendre confiance. La faillite des idéologies, avec leur cacophonie actuelle, et leurs structures archaïques classiques, a été confirmée par l’élection de Macron.Pourtant ces partis avaient réussi, par le passé, à soulever les masses et  ils n’arrivent plus,aujourd’hui,à affronter un ordre nouveau, aux contours encore imprécis et imprévisibles.
En un mot, c’est là, à notre sens, un moyen d’engager nos élites à se libérer des carcans idéologiques  pour honorer la mémoire des martyrs. Elles répondraient sûrement en masse à cette offre de participation, accepteraient de mettre ses engagements et ses potentialités au service d’une Tunisie qui compléterait l’œuvre de Bourguiba,toujours unie et solidaire. Le don de soi et le dépassement guidant cette réflexion, de la diversité  et de son apport,  peut émerger,  dans la transparence,  les étapes nécessaires à offrir un projet garantissant la sécurité, l’emploi, la santé  et l’épanouissement de chacun et de tous. La tâche est passionnante et par cette approche  une nouvelle page s’écrira dans l’histoire de notre pays : un changement de style et une offre réelle de participation.
*HAJI Rejeb universitaire

décoré de l’ordre de l’Indépendance, de l’ordre de la République et de l’ordre de la Jeunesse.
Dr d’Etat en sciences économiques, Dr d’Etat en Statistique, Diplômé de l’IAE Paris,Auteur de  quatre livres de statistique.Membre  de la Commission administrative de L’UGET en Europe (1967-1969). Premier maire d’une commune rurale Melloulèche.Ancien chef de cabinet dans plusieurs ministères.

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