- société
Comme chaque samedi après-midi, Omar et sa bande de copains se sont donnés rendez-vous dans la station de métro du quartier pour aller faire un tour. Ils montent bruyamment le wagon et s’installent dans les sièges arrières, histoire d’avoir une vue panoramique et de mieux distinguer les passagers.
A quelques rangées d’Omar, une jeune-fille est assise seule. Le jeune-homme fait un clin d’œil à ses copains qui s’éclatent de rire, puis se met debout et se dirige, l’aire fière, vers la passagère.
Il s’assoit dans le siège en face et commence à fixer la jeune-fille du regard. Gênée, cette dernière baisse sa tête et prend son portable faisant mine de chercher quelques choses. Omar, se sentant de plus en plus puissant, jette un regard complice sur ses copains.
L’un deux, visiblement excité, commence à l’appeler à haute voix : « Omar ! Vas-y mon frère ! C’est sûr que c’est une dévergondée qui sort se promener le soir pour se taper ces saletés de libyens! ». Tout le groupe se met à rigoler. Dans le wagon, tout le monde regarde la scène en silence.
A vrai dire, personne n’ose interférer de peur de recevoir un coup de poing, ou pire encore, un coup de couteau en plein ventre. Omar sourit, puis s’adresse à la jeune-fille : « C’est quoi ton portable ? J’ai le même ».
La jeune-fille ne lui répond pas, toujours absorbée par son téléphone. Omar n’est pas découragé, il reprend : « Eh, je te parle, c’est quoi ton portable ? ». La passagère l’ignore de plus belle. Omar continue : « Pourquoi tu ne me réponds pas ? ».
La jeune-fille se met soudainement debout et marmonne furtivement : « Tu me déranges ». Elle traverse le wagon et s’installe dans un autre siège. Omar la suit et vient s’assoir à côté d’elle, poussé par les propos de ses compagnons : « Laisse tomber Omar ! Tu ne sais pas t’y prendre, même les traînées rejettent tes avances comme on jette une vieille chaussette ! ».
Le métro s’arrête. La jeune passagère descend, mais Omar et sa bande de copains décident de l’épier en remontant l’avenue de Paris. En marchant derrière elle, le groupe se met à siffler. Omar, ne tolérant pas le désintérêt de la jeune fille, commence à l’insulter d’une manière abjecte : « J’ai envie de te … tu sais, salope, tu détournes encore ton regard de moi et je t’enfoncerai mon … dans ton … ». La jeune fille sent la peur l’envahir et presse le pas.
Elle a envie de crier au secours, mais les passants ne semblent pas sentir sa détresse. Alors, elle court se réfugier dans un magasin. Devant la vitrine, Omar fait des gestes obscènes avec ses amis. Comprenant la situation, le propriétaire se met à crier : « Allez-vous en ! Laissez la tranquille ! C’est quoi ces manières ! ». Le groupe part. Le propriétaire rétorque : « Y’a plus de respect. Ca fait 40 ans que je tiens ce magasin. J’ai connu donc l’heure de gloire du centre ville de Tunis. Ses avenues étaient fréquentées par la crème de la crème. Bars, restaurants, boutiques de luxe, tout est parti en quelques années ! Je ne comprends pas pourquoi ».
La jeune fille s’est sentie rassurée auprès de ce vieil homme d’un autre temps. Elle le remercie et sort du magasin. Elle emprunte l’une des ruelles de la capitale. Brusquement, elle sent une personne qui la traîne dans un entrepôt vide. Elle reconnait la voix d’Omar et veut crier, mais un de ses copains menace de la balafrer. Alors, elle se laisse faire …
Dans le poste de police, l’inspecteur interroge Omar : « Pourquoi avez-vous harcelé puis violé la victime ? ». « Car elle a refusé mes avances, dit l’agresseur, je ne la harcelais pas, je la draguais seulement ».
Par Hajer Zarrouk