- société
Par Jamel Saber
Sachant que faire payer les riches, serait une idée saugrenue pour les uns, juste pour les autres, mais de toute façon une idée de gauche, voire d’extrême-gauche, une exclusivité en quelque sorte. Il n’est ici question que des revenus de personnes physiques. Si la pauvreté soulève l’indignation unanime, et qu’il faut la combattre, en revanche la fortune, elle, est plus rarement perçue comme un problème. Avec la tempête économique et financière des derniers temps, le lien entre l’une et l’autre refait surface, comme en témoigne nombre de mouvements sociaux sur le pourtour du bassin méditerranéen dont la Grèce Portugal Espagne Chypre et autres pays.
Or cette idée est très ancienne, elle est née aux Etats-Unis, vers la fin du 19éme siècle. Plafonner les revenus des personnes physiques, est bel et bien une idée américaine ! Elle n’a certes aucun rapport ni de près ni de loin, car elle découle d’une simple perception pragmatique, et ne serait ainsi donc, comme la croyance générale l’accrédite un florilège estampillé de longue date de la pensée socialiste. En 1935, le président Franklin D. Roosevelt scandalise l’Amérique fortunée en annonçant son intention de « faire payer les riches » pour résoudre la crise. Il crée, alors une taxe de 79 % sur les revenus supérieurs à 5 millions de dollars.
Sachant qu’en France, le gouvernement Ayrault a poussé le bouchon à l’extrême, il a mis en place une taxation à 75% pour les revenus du travail ( et non du capital ) supérieurs à 1 million d’euros par an pour une personne seule et à 2 millions d’euros pour un couple. Sachant aussi que l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en France, est un impôt sur la fortune payé par les personnes physiques et les couples détenant un patrimoine net imposable égal ou supérieur à un certain seuil d’entrée au premier janvier de l’année considérée. Cet impôt progressif par tranches est assis sur la partie supérieure du patrimoine, au-delà d’un seuil défini par le commencement de la première tranche, qui peut être différent du seuil d’entrée, et qui peut également varier d’une année à l’autre, suivant les années et les lois en vigueur. Au 1er janvier 2013, le seuil d’entrée est fixé à un million trois cent mille euros, et les taux vont de 0,5 à 1,5 %, la 1re tranche s’appliquant à partir de huit cent mille euros.
L’ISF est un impôt déclaratif et auto liquidé. Le calcul du patrimoine s’effectue, quant à lui, en fonction du foyer fiscal, mais sans considération du régime matrimonial. Il retient donc les éléments du patrimoine appartenant à l’ensemble des membres du foyer fiscal, soit dans le cas d’un couple tous les biens appartenant à l’un ou à l’autre des conjoints. Tous les biens du foyer fiscal sont pris en compte (biens immobiliers, fonds de commerce, devises, etc.) à l’exclusion de ceux expressément exonérés par le code général des impôts. Les biens immobiliers doivent être évalués à leur valeur de marché, c’est-à-dire par comparaison avec les transactions de biens similaires ayant été réalisées.
L’imposition des tunisiens les plus riches devrait donc être l’une des mesures phares mise en avant par le gouvernement, qui doit mettre un plan de redressement des finances publiques. Le débat entre la droite et la gauche, mais aussi au sein de la majorité, et de la société civile, porte sur les impôts et taxes nouvelles à mettre en place, le niveau où la taxation doit commencer et sur son caractère exceptionnel ou régulier. Ainsi que sur la révision vers la hausse des taux de ceux existants pour faire payer d’avantage les plus favorisés, et les grosses fortunes.
Ainsi je propose pour mon pays l’imposition de l’ISF selon les tranches suivantes à partir d’un seuil de 500.000 dinars et plus : – de 500 milles dinars à 1 million d dinars : 0,5 % – de plus d’un million à 2 millions d dinars : 1,0 % – de plus d 2 millions à 5 millions d dinars : 1,5 % – de plus d 5 millions à 10 millions d dinars : 2,5 % – de plus d 10 millions d dinars : 5,0%.
On attribue à Colbert le bon mot selon lequel : « l’art de lever l’impôt consiste à plumer les oies sans trop les faire crier. » Le pouvoir politique a en effet toujours eu pour préoccupation de s’assurer que ses prérogatives fiscales n’étaient pas contestées. Cela l’a conduit à multiplier impôts indirects et taxes de toutes natures qui tendent à rendre l’impôt invisible car totalement intégré aux prix des biens et services. Raison de plus pour nos gouvernants actuels d’éviter l’ISF, ceci pour ne pas en faire des riches leurs ennemis jurés.
Mais en démocratie, le contribuable est avant tout un citoyen. Invité à prendre part à la gestion des affaires publiques, il est en droit d’exiger la transparence fiscale conformément à l’article 14 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. « Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. » C’est la condition sine qua non pour rétablir la confiance contribuable- fisc-gouvernants.
L’argument selon lequel les hausses d’impôts viendraient briser la croissance est fallacieux. Il est vrai que trop d’impôts tue l’impôt, mais les plus aisés doivent se déclarer désormais favorables à payer plus car ils savent que s’ils ne mettent pas la main à la poche rapidement, ils risquent encore plus gros demain.
Je considère le paiement de l’impôt comme un devoir civique. Le principe d’équité demande un effort équivalent à tous les contribuables. Issu notamment des travaux socialistes réformistes, la thèse de l’impôt solidaire présente le prélèvement fiscal comme un sacrifice nécessaire à l’entretien du lien social. Elle repose sur la promotion d’une identité collective, l’impôt servant au financement des charges communes mais aussi, par la redistribution, à la cohésion du corps social.
Je sais que cette publication va déplaire à certains de mes amis ou pas aisés, pour ne pas dire tous et c’est normal. Mais je demande quand même à mes concitoyens qui seraient concernés par l’ISF, si elle est appliquée un jour chez nous, de se sacrifier par patriotisme en donnant une infime partie de leurs richesses, ceci par solidarité aux plus démunis des régions de l’intérieur du pays et aux autres.
Quoique j’en doute fort de son adoption dans l’avenir, avec ce parti ultra libéral majoritaire qui nous gouverne en ce moment, et ce parlement l’ARP avec plusieurs élus milliardaires, sauf miracle !