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Cinq années après la révolution : Un Nobel, des martyrs et des désillusions – Femmes Maghrébines

  • Cinq années après la révolution :  Un Nobel, des martyrs et des désillusions – Femmes Maghrébines

Cinq années se sont écoulées depuis le déclenchement de ce qu’on appelait, jadis, la révolution du jasmin. Cinq années passées en coup de vent entre attente, espoir et désillusion. Deux élections plus tard, l’état des lieux des libertés, de la corruption, de la sécurité, de l’environnement, du tourisme, des médias et de l’éducation nous met dans un état de désespoir total.
Le 14 janvier : entre rêve et mystère
En vingt-trois ans de règne, Ben Ali ne s’était jamais affiché aussi vulnérable que lors de son dernier discours, prononcé un certain 13 janvier 2011. Un discours de défaite et de faiblesse mais personne n’aurait jamais pu imaginer que le lendemain même, il disparaîtra sans jamais laisser de traces. Et pourtant, il l’a bien fait et nous n’avons même pas eu l’occasion de fêter son départ et, surtout, celui de sa belle-famille qui nous a tant fait souffrir. Les jours qui ont suivi ce départ ont été violents et angoissants. On parlait, à l’époque, de la politique de la terre brûlée qu’aurait initiée Ben Ali, depuis son exil doré, pour se venger de nous tous. Depuis, plusieurs ouvrages et théories ont été déballés partout et chacun tentait de nous convaincre qu’il détenait la vérité. La plus récente des versions est celle de l’ancien Général de l’Armée, Rachid Ammar. Sur un coup de tête, l’ancien militaire a parlé d’un complot, d’un ministère et de patriotisme. Mais, et comme cela se fait à chaque fois, des démenties ont suivi ces ‘bombes’.
2012-2013 : L’apogée de la terreur
Assoiffés de démocratie et de citoyenneté, certains ‘révolutionnaires’ ont mis main dans la main et se sont rassemblés à la Kassbah et la revendication était claire : une nouvelle constitution, un régime semi-parlementaire et des élections transparentes.
Ayant succédé à Mohamed Ghannouchi – en 201 – Béji Caïd Essesbi a eu la lourde tâche d’organiser les premières élections législatives postrévolutionnaires. Dirigée par Kamel Jendoubi, l’ISIE avait mené à bien sa mission, résultat : les islamistes ont accédé au pouvoir. Quelques jours plus tard, Ettakatol et le CPR – deux partis supposés défendre la laïcité de l’Etat – ont rejoint Ennahdha pour former la plus désastreuse des Troïkas.
Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi, Socrate Cherni, et des centaines d’autres soldats et agents de l’ordre ont été sauvagement assassinés par les terroristes. Moins de trois ans de révolution, la Tunisie a été en effet envahie par l’extrémise et le djihadisme. Cela sans compter bien-sûr la fameuse crise des poubelles, celle du chômage et l’expansion des écoles coraniques dans toutes les villes de la République
2014-2015 : le désespoir postélectoral
Suite à la descente aux enfers, une partie des Tunisiens a occupé la place du Bardo demandant ainsi au pouvoir en place de partir. Le sit-in Errahil a donné naissance au Quartet et au Dialogue national. Après plus de deux mois de négociations, le gouvernement d’Ali Laârayedh a cédé sa  place pour celui de Mehdi Jomaâ. Un gouvernement qui a relativement réussi sa mission en organisant les élections législatives et la Présidentielle de 2014. L’euphorie avait régné : Nidaa Tounes, mouvement moderniste prônant la modernité et la civilité de l’Etat, a réussi à décrocher la place du mouvement d’Ennahdha.
Plus d’une année plus tard, et cinq ans après notre révolution, la Tunisie est prise entre deux maux : celui du terrorisme – avec trois actes terroristes en une seule année – et celui de la chasse aux sorcières des classes minoritaires. Homosexuels, consommateurs de cannabis ou artistes vivant à leur guise, sont mis dans la ligne de mire du pouvoir en place.
La révolution du jasmin s’est métamorphosée, en quelques années, en la révolution de la désillusion et ce en dépit de l’obtention du prix Nobel de la paix par le Quartet !
Ghalia Ben Brahim

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