- société
Samantha Ben-Rehouma
Les manifestations continuent en Turquie depuis le viol et l’assassinat d’une étudiante, la semaine dernière.
Sous les regards curieux et parfois franchement amusés des passants sur la grande rue piétonne d’Istiklal qui mène à la célèbre place de Taksim (sur la rive européenne de la mégapole), bravant les chutes de neige et un froid glacial, vêtus de jupes et de mini-jupes, un groupe d’hommes (certains étaient même accompagnés de leurs enfants) a dénoncé samedi 21 février, à Istanbul, le viol et le meurtre d’une étudiante qui avait provoqué une vague d’indignation en Turquie contre les violences faites aux femmes.
Des policiers avaient été mobilisés pour encadrer la manifestation annoncée par un collectif sur les réseaux sociaux pour dénoncer l’horrible meurtre d’Özgecan Aslan, à Mersin, la semaine dernière, et soutenir ainsi «toutes les femmes». Le corps brûlé d’Aslan avait été découvert le 13 février dans une rivière dans la province turque de Mersin sud, déclenchant alors un débat public. Plusieurs critiques conservateurs allant même jusqu’à dire que la tenue « provocatrice » de certaines femmes est une raison « valable » d’agressions sexuelles et de harcèlements !!
«Ce n’est pas qu’une histoire de femmes, là où les femmes ne peuvent pas se sentir libres, bientôt les hommes ne se sentiront plus libres non plus», a expliqué Mustafa Solay, un des participants de la manifestation.
Bulut Arslan, un autre manifestant, a indiqué qu’il était venu «parce qu’au sein de la société les femmes subissent de nombreuses violences et cela fait du mal à toute la société en général».
Le meurtre d’Özgecan, 20 ans, violée, assassinée et brûlée par trois hommes, a provoqué une vague d’indignation sans précédent dans le pays, et des dizaines de milliers de personnes ont défilé dans les grandes villes de Turquie contre les violences faites aux femmes.
Samedi encore, plusieurs centaines de manifestants ont défilé à Besiktas, dans un autre quartier d’Istanbul, scandant «Dis non à la violence frappant les femmes!».
Mis en cause, le gouvernement islamo-conservateur qui avait promis de punir les auteurs des faits. Malgré ces promesses, l’opposition et les mouvements féministes n’ont pas hésité à reprocher au président Recep Tayyip Erdogan et aux membres de son parti, au pouvoir depuis 2002, d’entretenir les violences contre les femmes par leurs préjugés religieux.
Rappelons qu’en novembre 2014, Erdogan avait affirmé, et ce, sans détour que les femmes ne pouvaient pas être naturellement égales aux hommes. Il avait aussi critiqué vertement les féministes, les accusant d’être opposées à la maternité. «Notre religion (l’islam) a défini une place pour les femmes (dans la société) : la maternité. »…
Mieux vaut être sourd que d’entendre ça !