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Finalement adoptée, la constitution a donné de l’espoir aux Tunisiens, et a créé de l’harmonie entre les rivaux politiques. La mise en scène « très » émotive, sur la toile, de la réconciliation entre Mongi Rahoui, et Habib Ellouz a fait, selon certains, le buzz. Et c’est comme si ceux-ci confondent politique et humanisme ou considèrent, à tort, que les politiques n’ont pas de cœur. Or, en réalité, cette image circulant sur Internet, n’a rien d’un scoop voire de paradoxal. « Il s’agit simplement de deux courants différents et selon lesquels l’expression devient orientée. J’étais dans ce contexte là contre Ellouze le politicien et non Ellouze l’individu», nous a affirmé Mongi Rahoui, leader du Parti des patriotes démocrates unifié (PPDU).
Est-ce que vous êtes parvenus tous les deux finalement (NDLR : Habib Ellouze) à mettre fin au clash entre les «tenants de la croyance» et «les accusés de mécréance» au sein de l’Assemblée nationale constituante (ANC)?
Non, on continue à instrumentaliser la religion en tant qu’outil de bataille politique. Actuellement Habib Ellouze (député représentant Ennahda) est toujours dans l’impunité. Dans ce sens, des avocats ont pris l’initiative de déposer une plainte contre lui pour ce qu’il a fait. Je n’étais pas le seul à faire objet des menaces de mort. Avant moi, ce fut également Chokri Belaid. Et c’est dans le cadre de l’assassinat de ce leader du front populaire que Habib Ellouze a été entendu par le juge d’instruction.
Ces différends sont-ils politiques ou personnels ?
En effet, je n’ai rien contre Habib Ellouze, en tant que personne. Il s’agit de deux courants différents et selon lesquels l’expression devient orientée. L’action quant à elle est à négocier à l’ANC. Si pour nous, le principe est de séparer le politique du religieux, pour les autres, se regroupant, à mon avis, sous l’étiquette de parti religieux, il s’agit plutôt de « religionaliser » la politique, à chaque fois qu’il y a isolement (politique).
Le clash était-il nécessaire à l’interdiction ?
Oui, cette question fut la source de son interdiction. Ils étaient entrain de revenir sur l’article 6. On a voulu retirer cette énonciation d’interdiction de l’apostasie dans l’article, ce qui s’avère pour nous une bataille continue. Nous leur avions dit que s’ils suppriment cela, cela aurait été d’une part une affirmation claire d’une autorisation explicite et sincère de cette apostasie (une prise de position) et d’autre part cela aurait été une forme d’autoroute menant à l’apostasie sur le plan concret (un fait). Heureusement, le problème est résolu.
Actuellement, vous sentez-vous protégé ?
Je suis hautement protégé par des forces de sécurité mais les menaces sont toujours «valables», on le sent de tous les côtés parce, tant que l’apostasie existe, la menace existera.
Je suis protégé, mais mon champ de liberté se restreint de plus en plus. Ma liberté actuellement n’est pas naturelle, donc même si je suis protégé, je ne peux pas sentir que c’est le cas.
Comment est-ce que vous voyez l’avenir de la Tunisie, à travers les débats à l’ANC sur les conditions de la candidature à la présidence ?
À mon avis, la vraie question aurait été de savoir éviter prochainement toute tentative de manipulation ainsi que cette hantise de fraude pendant les élections, car en fraudant, on fraude l’électeur avant même qu’on ne le fasse pour les élections.
Or, le débat avait été axé sur plusieurs questions. Devrait-on conserver celles qui concernent la nationalité ou encore celles qui traitent de la délimitation de l’âge? À mon avis, la règle aurait, normalement, pu voire du être celle qui suppose qu’il n’y aurait pas de condition. Nous rappelons que l’article 20 de la constitution annonce clairement que tout citoyen et toute citoyenne jouissent pleinement de leurs droits sans aucune distinction et sans aucune ségrégation.
D’entrée de jeu, déjà dans l’article 3 de la constitution, on dit que le peuple tunisien est un peuple souverain, donc on doit donner au peuple le droit de choisir ce qu’il veut, qu’il ait 18 ans ou qu’il soit du 18e siècle.
Propos recueillis
par Chaïmae BOUAZZAOUI