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Victime d'inceste à l'âge de 6 ans,…. à 36 ans elle décide de tout dévoiler

  • Victime d'inceste à l'âge de 6 ans,…. à 36 ans elle décide de tout dévoiler

Activiste, non, pas encore. Journaliste et femme libre, elle se nomme Emna. Elle est Tunisienne et âgée de 36 ans, un soir elle décide de tout dévoiler.
Une soirée estivale habituelle, entre famille. On rit, on s’amuse, on discute, les hommes réunis autour d’une table parlent politique, les femmes chuchotent, seules, dans un coin de la femme violée qui est venue tout dévoiler dans une émission télé la veille. Elles sont sous le choc de voir que de nos jour dans un pays musulman on ne respecte plus les mœurs et on parle de viol de cette manière élancée – elles se foutent de ce que la femme a pu sentir et tant pis si c’est le drame de toute une vie.
« Violée » ? Tu es sûre ? Moi je n’en crois pas un mot » disait l’une de ses tantes ? Elle l’a certainement provoqué ? Un homme ne viole pas une femme comme ça, gracieusement, sans qu’elle l’ait provoqué.
La suite, Emna la connaît parfaitement. Autour d’elle, il n’y a que les préjugés qui assourdissent son vécu. Mille fois, elle a entendu des violeurs réhabilités et mille fois elle a vu des victimes s’écraser devant l’intolérance. Mais en rentrant chez elle et face à tout cela,  Emna décide d’agir. Elle accède à son Facebook et balance tout.
Elle publie :
« j’avais 6 ans quand un proche parent a tenté de me violer. J’étais toute petite, je n’avais pas compris ce qui se passait sur le coup. Il avait 18 ans, en plein crise d’adolescence. Je me souviens comme si c’était hier. Mes parents sont partis je ne sais où et ils m’ont laissé chez une tante lointaine. Elle avait un adolescent, un délinquant, qui a profité de l’absence de sa mère pour faire ce qu’il avait envie de faire. Heureusement sa mère, la soit dite tante est venue à temps avant que je sois complètement violée. Moi, je n’oublierai jamais cette atrocité, cette barbarie et ce sadisme. Je  savais que quelque chose n’allait pas, il me touchait dans des endroits intimes et je ne pouvais pas empêcher le loup de me retirer ma petite culotte. »
Emna, a grandi, elle a actuellement deux agréables enfants. Mais ce qu’elle a vécu, quand elle avait à peine 6 ans, a impacté gravement sa relation intime avec son ex-mari qui a connu en fin de compte l’échec et le divorce.
Même sa jeunesse n’était pas un cadeau. On dit qu’un loup n’attaque jamais une seule fois et on n’est jamais victime une seule fois. Elle dit qu’elle avait 23 ans quand son petit copain l’a forcé « un petit effort, allez, tu sais que tu me plais ». Elle confirme qu’à 36, elle en a marre de se taire et de se serrer les dents et de voir que l’obscène soit vécu comme un fait divers. Elle d n’est coupable de rien et son corps lui appartient désormais. « Allez-y, à nous toutes, on parlera plus fort ». Emna pense lancer une alerte sur les réseaux sociaux pour parler de son tourment et de son histoire : « je n’ai plus peur de parler vous savez » annonça à ses copines.
Nous lancerons un coup de gueule, un cri de tonner, nous lancerons un Hachtag Non à L’inceste, Non au viol et Non au silence. Les voix dissipées de celles qui se sont toujours tus et qui souffrent en silence, là, elles ne s’arrêteront plus. Nous serons des toutes les femmes de Bizerte à Ben Guerden des journalistes, des étudiantes, des mères de familles, des enseignantes, des militantes à dire non à l’inceste et au viol. L’inceste, cette abomination frappe partout peut-importe la classe sociale, l’âge ou le pays.
Alors partout, nous devons rompre ce silence absurde et tout dévoiler à la société : » j’avais douze ans, j’avais 19 ans, j’avais 21 ans. J’étais dans le métro, dans la rue, dans le bus, un soir, une après midi, un matin, assez tôt. C’était un cousin, un petit copain, mon chef de travail. Il était très gros, il était costaud ; il a attrapé ma veste, mon bras, mes fesses et il m’a serré ; le wagon était bondé, ou la rue était vide, mais j’étais tétanisée. Alors ça s’est passé. Pourtant, je portais un pantalon, promis, juré. Pourtant, je ne l’ai pas aguiché, même pas regardé. Juré, craché. A chaque fois, elles finissent toutes par se justifier. Un réflexe, presque obligé. »
Le hachtag doit circuler. Fatma, Emna, Nessrine, Yasmmen, toutes doivent raconter ce qu’elles ont vécu, dire la raison pour laquelle elles avaient honte auparavant, mais qu’elles n’ont plus peur de parler désormais. Une solidarité doit s’instaurer entre nous les femmes et surtout faire tout exploser. Emna l’a écrit, l’a publié. A nous de salué son courage à dénoncer le crime. Maintenant le spectre de notre action doit s’agrandir et les hommes, aussi doivent nous joindre dans ce cri et parler eux aussi. Certains, ont été victimes de viol un jour et ils n’ont jamais avoués. Il est temps d’agir. La meute hurlante et déchaînée doit débarqué sur les réseaux, nous n’avons plus envie de se taire. Il n’est pas tard, c’est dit, c’est fait, ça ne fait pas tout, mais, pour la première fois, nous n’avons pas plus peur de parler.
 
Par Emna Khlifi

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